Market Flash spécial : point sur l’impact de la situation Russie/Ukraine sur les marchés

Dans cette édition de notre newsletter, nous publions un Market Flash spécial sur la situation en Ukraine et l’impact économique sur le reste de l’Europe. 

L'offensive militaire russe en Ukraine, tant redoutée par les occidentaux ces dernières semaines, a finalement été déclenchée ce jeudi matin à l'aube. Une série d'explosions a été entendue dans plusieurs villes d'Ukraine, dont la capitale Kiev, à la suite de "l'opération militaire spéciale" lancée par Vladimir Poutine. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a proclamé la loi martiale dans tout le pays. L’opération militaire dépasse les seules régions du Donbass et alimente les craintes d’un conflit plus large sur l’ensemble du territoire ukrainien.

Les dirigeants occidentaux n’auront d’autre choix que de prendre des sanctions beaucoup plus importantes, cela amplifie un regain d’aversion pour le risque particulièrement fort ce matin. À 10h, l’indice Euro Stoxx était en recul de 3%, entrant même en territoire de correction. Les taux souverains européens reculaient de 7 points de base, le pétrole avait passé la barre des 103 dollars le baril pour le Brent au plus haut sur 8 ans, le gaz était en hausse de 29% (la Russie fournit près de 40% du gaz consommé sur le Vieux Continent) et le blé progressait de 3%.

Le rouble a atteint son plus bas niveau historique face au dollar (-8%) et à l’euro (-6%) ce jeudi matin. A l’ouverture de la bourse de Moscou, après une suspension temporaire, l’indice Moex (en roubles) plongeait de 28%.

Le prix de l'aluminium a atteint jeudi matin un nouveau record historique, à 3.382,50 dollars la tonne. Les acteurs du marché craignent que l’approvisionnement en aluminium de Russie ne soit affecté en cas de sanctions sévères de l’Occident et de mesures de représailles de la part de la Russie.

L’or reprend son statut de valeur refuge et progresse de 2% tandis que le bitcoin n’a pas la cote (en chute de 8%).

Les conséquences économiques de la crise ukrainienne dépassent déjà largement l’Est de l’Europe. L’enjeu pour les prochains jours est lié à l’ampleur des sanctions qui devront être prises. Les banques centrales se questionnent aussi sur les implications durables que la crise pourrait avoir sur leurs choix et leurs options de politique monétaire.

Tout porte à croire que les forces russes ne se contenteront pas d’intervenir dans les seuls territoires séparatistes du Donbass dont l’indépendance avait été reconnue en début de semaine par Moscou, mais bien dans l’ensemble du territoire ukrainien. Des attaques contre les aéroports ont eu lieu dans l’ensemble du pays et des explosions ont été reportées y compris à l’ouest de Kiev. Par ailleurs, dans son discours prononcé cette nuit, Vladimir Poutine a indiqué que l’ objectif de l’intervention des forces armées était de « démilitariser et dénazifier » l’Ukraine. Cela semble indiquer que le but visé est désormais de dominer une partie plus grande de l’Ukraine, voire tout le territoire ukrainien en faisant tomber le régime en place.

Tous les dirigeants internationaux sont mobilisés mais l’équilibre à trouver sera particulièrement délicat. D’un côté, la capacité de riposte des Européens semble limitée à cause de la dépendance à l’énergie mais, de l’autre, des sanctions trop limitées pourraient envoyer un signal défavorable.

La réaction de Vladimir Poutine aux sanctions qui seront prises sera également cruciale alors que le président russe a menacé de graves répercussions pour ceux qui tenteraient d’ingérer dans la situation ukrainienne. Dans un contexte d’aggravation des tensions sur les matières premières, y compris alimentaires compte tenu du poids de l’Ukraine et la Russie (notamment pour les céréales), les impacts néfastes pour les perspectives économiques risquent d’être importants. 

Une forte hausse des prix de l’énergie, avec à la clé des pressions inflationnistes encore plus élevées et plus durables, pourrait conduire la banque centrale européenne (BCE) à retirer de manière encore plus agressive son soutien monétaire cette année. Si l’activité reste résiliente en zone euro, des pressions inflationnistes toujours très fortes et qui pourraient être encore renforcées via les prix de l’énergie du fait de la crise entre l’Ukraine et la Russie risquent surtout de mettre la BCE dans une situation très inconfortable. Selon les sanctions qui seront prises, le choc sur la croissance pourrait toutefois mettre à mal les perspectives d’inflation de moyen terme et conduire l’institution à repousser la hausse des taux directeurs. L’évaluation de ces deux forces contraires sera délicate et porteuse d’une grande incertitude. La situation actuelle risque donc de réduire la capacité de la banque centrale à donner un chemin de sortie très détaillé et clair lors de la prochaine réunion de mars.

Cette situation improbable et imprévisible nous met en face de deux scénarios possibles :

1.     Une solution est rapidement trouvée dans le sens où les hostilités se calment et de longues négociations politiques prennent le relais avec la Russie en contrôle de l’Ukraine mais sous conflit localisé

2.     Cela dégénère et le conflit s’étend ou continue et les marchés seront durablement impactés.

Nous recommandons donc la prudence sachant que des opportunités d’investissement seront probablement à saisir.