Les spreads 

Le rendement (« yield » en anglais) d’une obligation peut être décomposé en deux éléments :

- un taux « sans risque »

- credit spread / non-credit spread, soit un différentiel de taux pour le crédit et pour les autres éléments

Les proxys utilisés en Europe pour estimer le taux sans risque sont les taux EONIA/Euribor qui sont deux indices de référence sur le marché interbancaire en euro (marché où les banques se prêtent des liquidités en euro). La différence entre le taux EONIA et Euribor provient uniquement des maturités concernées (EONIA étant d’une maturité d’un jour alors qu’Euribor concerne les maturités plus longues). Suite à une nouvelle régulation européenne, le taux EONIA sera remplacé dès janvier 2022 par le taux ESTER, taux qui sera utilisé par la banque centrale européenne (BCE) pour calibrer sa politique monétaire (certains manquements dans la méthodologie de calcul du taux EONIA ont en effet poussé la BCE à améliorer la méthode de calcul de ce taux de référence). La méthodologie de calcul des taux euribor sera également ajustée.

Ces indices sont utilisés dans des produits dérivés nommés SWAP, il s’agit d’un taux d’échange pour passer d’un taux flottant (notre indice de référence) à un taux fixe. Il existe donc une courbe des taux swap sur les différentes maturités. Le taux swap de référence correspond au taux fixe équivalent à un taux variable donné. Le point 1 an de la courbe swap sera donc le taux fixe équivalent à un taux variable, idem pour le point 2 ans et ainsi de suite. Nous pouvons entrer dans des swaps contre des taux variables différents (EONIA, Euribor, Ester,…). La logique étant toujours, quel est le taux fixe équivalent à ce taux variable sur une maturité donnée ? Cette courbe swap nous donnera donc notre courbe de taux sans risque.

La différence entre le rendement de l’obligation et le taux sans risque est nommée spread et correspond au surplus de rendement demandé par le marché pour compenser le risque lié à l’émetteur sur une maturité comparable. Il s’agit en quelque sorte du risque de défaut qui pourrait être couvert par un CDS (Credit Default Swap) dont nous parlerons dans une prochaine publication de ce Market Flash. Outre le spread relatif au crédit (santé financière de l’émetteur), une partie est expliquée non pas par l’aspect crédit mais d’autres éléments comme le risque d’illiquidité, le risque de remboursement anticipé (si prévu par un call), …

Le risque de défaut correspond au risque qu’un émetteur d’une obligation ne puisse plus remplir ses obligations de paiement (coupons ou nominal à la maturité). Il ne s’agit donc pas nécessairement d’une faillite de l’émetteur mais d’un non-respect qui peut n’être que temporaire à l’une de ses obligations. Le risque de crédit représente la majeure partie du yield spread car le risque de défaut est présent principalement quand l’investisseur compte détenir l’obligation jusqu’à la maturité de celle-ci, ce qui est souvent le cas dans le marché des obligations d’entreprise.

Le risque crédit est estimé en majeure partie via des agences de ratings externes dont les principales sont : Moody’s, Standard and Poors et Fitch. Ces agences allouent un rating à des émetteurs ou émissions en fonction de leur risque de défaut. Vous trouverez ci-dessous les différentes catégories de ratings pour les 3 agences de notations :

Les ratings sont scindés en 2 catégories : Investment Grade (ratings supérieurs à BBB-/Baa3) et non-Investissement Grade ou High Yield bonds (ratings inférieurs à BBB-/Baa3). Ces agences ont comme objectif d’assister le marché en fournissant une évaluation indépendante sur la qualité de crédit d’une compagnie/état/entité publique/…

Le spread d’une obligation évoluera principalement en cas de :

  • Downgrade de l’agence de notation (nommé risque de downgrade) ou d’upgrade.
  • Opinion du marché que la qualité de crédit de l’émetteur s’est détériorée ou améliorée et qui nécessiterait un spread supérieur/inférieur pour compenser le risque de défaut accru/moindre.
  • Evolution de la liquidité d’une obligation (écartement ou resserrement du bid-ask spread, soit du prix à la vente ou à l’achat).

Les derniers événements de 2020 ont montré une forte fluctuation des spreads corporate (emprunts de sociétés). En effet, en mars 2020, les spreads ont fortement augmenté, poussés par un risque de crédit supérieur suite à la crise du coronavirus qui frappait le monde et les marchés financiers. Les mesures de confinement avec un arrêt de l’économie pendant la crise, ont fait craindre des risques de faillite en cascade (risque de défaut qui ont donc augmenté) àspreads plus élevés. En outre, il est important de noter que le prix d’une obligation évoluera toujours de façon inverse au spread (en considérant un taux sans risque fixe).

Le graphique ci-dessous illustre l’évolution du taux swap 10 ans (=taux sans risque) et du yield des corporate BBB 10 ans sur l’année 2020 (le différentiel entre les deux nous donnera donc le spread entre ces 2 courbes) :

Imaginons un investisseur, Mr Dupont, qui achète une obligation de la société lambda en janvier 2020 offrant un yield de 1,5%. En mars 2020, la crise du coronavirus frappe le marché et le risque de défaut augmente au sein des acteurs économiques (société lambda comprise). Ce risque de crédit accru poussera les spreads à la hausse. Si la même société lambda souhaitait se financer en émettant de la dette sur le marché en mars 2020, elle devrait payer un rendement supérieur pour compenser les investisseurs de leur perception d’un risque de crédit accru. Mr Dupont aura donc en portefeuille une obligation offrant un yield inférieur au yield du marché actuel, ce qui se reflètera par une baisse du prix de cette obligation.

Cet article n’est pas un document commercial. Il s’agit d’une analyse la plus objective possible d’un fonds sous-jacent d’un de nos fonds internes réalisée par le service Investment Management d’Allianz Benelux en Belgique. Le but de cet article est d’apporter une meilleure compréhension des objectifs et de la gestion de ce fonds. Le fait que nous écrivions un article au sujet de ce fonds ne signifie en aucune manière que nous le recommandions davantage que les autres fonds et ne constitue aucunement un conseil en investissement.

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