Blog | 3 décembre 2025

Responsabilité décennale dans la construction : guide de vos assurances 

Un projet de construction ou de rénovation est un processus complexe qui comporte de nombreux risques potentiels.
Des dégâts causés par une tempête et un acte de vandalisme, à la responsabilité spécifique du maître de l'ouvrage pour les troubles de voisinage (article 3.101 C. civ.) : les risques financiers pendant la période de construction sont réels, tant pour les entrepreneurs que pour les architectes, mais aussi pour le maître de l'ouvrage lui-même.

En outre, la responsabilité décennale occupe une place centrale dans le secteur belge de la construction. C’est un principe juridique fondamental qui est crucial pour la protection après la réception des travaux, mais qui est souvent mal compris. Dans cet article, nous vous expliquons en quoi consiste cette responsabilité, qui est tenu de s’assurer et quel est le rôle essentiel de la réception.

La responsabilité décennale est une responsabilité définie par la loi, qui incombe aux entrepreneurs, architectes, bureaux d’études et ingénieurs-conseils en cas de vices graves mettant en péril la stabilité ou la solidité d’un bâtiment. Cette responsabilité vaut pour une période de dix ans, qui commence après la réception formelle des travaux.

Le principe lui-même est profondément ancré dans le Code civil belge, notamment dans les articles 1792 et 2270, et se concentre sur les vices qui affectent la solidité et la stabilité du bâtiment.

La « Loi Peeters », en vigueur depuis juillet 2018, y a ajouté un élément crucial : elle a introduit l’obligation d’assurance pour la responsabilité décennale pour les bâtiments résidentiels. 

La loi oblige des parties spécifiques liées à la construction à souscrire une assurance couvrant leur responsabilité décennale. Cette obligation d’assurance s’applique aux :

  • Entrepreneurs et sous-traitants
  • Architectes
  • Bureaux d’études et ingénieurs-conseils

Les assureurs proposent l’assurance « Responsabilité décennale Loi Peeters » qui peut être souscrite pour la totalité des travaux. Par ailleurs, les parties assurables peuvent choisir de souscrire chacune séparément une police pour leur part. La souscription d’un seul contrat auprès d’un seul assureur peut avoir pour conséquence que les sinistres éventuels peuvent être réglés de manière moins complexe et donc plus efficace.

Il appartient aux entrepreneurs de veiller à ce qu’une attestation d’assurance soit mise à la disposition du maître de l’ouvrage et de l’architecte.

La responsabilité décennale a un champ d'application strictement défini. Il est essentiel de comprendre les limites de la couverture.

Qu’est-ce qui est couvert ?

En vertu de la Loi Peeters en Belgique, l’assurance couvre la responsabilité décennale des entrepreneurs, architectes et autres professionnels de la construction pour les dommages causés par des défauts à la stabilité, la solidité et l’étanchéité d’un bâtiment.
La couverture se concentre sur la destruction totale ou partielle de l’ouvrage à la suite d’un effondrement total ou partiel, du fait d’un vice du gros œuvre fermé, ainsi que d’un vice du sous-sol.

Cela signifie que si, dans les dix années suivant la réception d’un projet de construction, des dommages dus à de tels défauts surviennent, l’assurance couvre les frais nécessaires à la réparation ou à la compensation. 

La date de début du délai décennal est l'un des éléments les plus critiques. Cette date est déterminée par l’acceptation, un processus qui, en vertu de la Loi Breyne (loi sur la construction d’habitations), se déroule en deux phases obligatoires :

  1. Réception provisoire
    C’est le moment où la fin des travaux est officiellement constatée. Le maître de l’ouvrage reçoit les clés (prise de possession) et le risque lié au bâtiment (par exemple, en cas d’incendie ou de tempête) est transféré de l’entrepreneur au maître de l’ouvrage.
  2. Réception définitive
    Il s’agit de l’acceptation formelle et définitive des travaux par le maître de l’ouvrage. Le législateur a délibérément instauré, en vertu de la Loi Breyne, un délai minimum d’un an afin que l’ouvrage soit exposé à toutes les saisons (pluie, vent, différences de température) et que, par exemple, les problèmes d’étanchéité puissent être détectés.

En principe, le délai de la responsabilité décennale commence à courir à partir de la réception définitive. Ce principe n’est pas qu’une simple directive ; il a été confirmé par la Cour de Cassation dans son arrêt du 16 octobre 2015, qui précisait que la réception définitive fait office de moment légal d’acceptation et active dès lors le délai décennal.

Attention : dans la pratique, on y déroge souvent contractuellement. De nombreux contrats types d’entrepreneurs prévoient que l’acceptation des travaux – et donc le début de la responsabilité décennale – a déjà lieu lors de la réception provisoire. Cette clause contractuelle, bien que légalement admissible en dehors de l’application stricte de la Loi Breyne, modifie fondamentalement le risque pour toutes les parties et a un impact direct sur la durée effective de l’assurance entrepreneur obligatoire.

Le besoin de couverture d’assurance dépend d’une bonne compréhension de votre responsabilité contractuelle qui est, quant à elle, déterminée par le timing précis de la réception du projet. Un malentendu dans n’importe quel maillon de cette chaîne peut avoir des conséquences financières importantes. Une bonne compréhension de la responsabilité décennale et des conditions d’assurance est essentielle pour garantir la stabilité du bâtiment et votre tranquillité financière.

Conseils concrets pour chaque partie :

  • Pour les entrepreneurs : lisez attentivement les contrats et le cahier des charges pour déterminer si la responsabilité commence à la réception provisoire ou définitive. Cela a un impact direct sur la durée de votre risque.
  • Pour les architectes et ingénieurs : la couverture d’assurance souscrite séparément pour la responsabilité décennale pour tous les participants aux travaux peut constituer un complément pertinent aux garanties de votre police de responsabilité professionnelle.
  • Pour les maîtres de l’ouvrage privés : utilisez activement la période de garantie entre la réception provisoire et la réception définitive pour détecter et signaler les éventuels vices cachés. L'existence d'une couverture d'assurance pour la responsabilité décennale vous permet en tout cas d’accroître votre tranquillité d’esprit.